Russell Coutts est une des légendes de la
Coupe de l'America. Il est sans doute l'un des plus grands barreurs qu'ait connu la "Cup". Il en est le vainqueur notamment en 2003 avec le syndicat Suisse
Alinghi. Il a été décoré, entre autres, de l' Ordre de l'Empire britannique.
Russell Coutts est né en 1962 à Wellington en Nouvelle-Zélande. Il est titulaire d'une licence d'Ingénieur de l'Université d'Auckland. Des compétences qui lui permettent une faculté d'analyse hors du commun, il peut passer des nuits entières à décortiquer dans les moindres détails une régate. Dès son plus jeune âge il va être initié à la voile, comme une majeure partie des jeunes néo-zélandais. En 1984 aux Jeux Olympiques de Los Angeles, blessé, il décroche de manière quasi héroïque la médaille d'or dans la catégorie Finn. Cette expérience va lui forger un caractère et une réputation qui le précédera. Russell Coutts n'a que faire des bonnes manières, il est de la race des gagneurs et plus rien ne va arrêter son ascension vers les sommets du monde de la voile. Pour lui, seule la victoire compte, et personne ne peut l'en faire dévier, une anecdote est restée célèbre lors de la coupe de l'America 2003. Lors de la première régate victorieuse d'Alinghi, il n'a même pas jugé bon de se déplacer à la traditionnelle conférence de presse. Pour seule excuse, il avança une réunion avec ses collaborateurs. Il en remis une couche en disant : "Je vous ai envoyé mes meilleurs équipiers et personne n'a été capable de poser une question intelligente, c'est insultant!".
En 1992, il devient champion du monde de match race, et 1993 il réédite cet exploit, mais surtout remporte l'Admiral's Cup, l'une des plus prestigieuses régates. Sir Peter Blake qui est en train de monter un team pour aller défier les Américains à San Diego dans la Coupe de l'América, suit de prêt ce Barreur surdoué et va faire appel à ses talents. Coutts devient le premier barreur de Black Magic le nom du voilier néo-zélandais.
L'Amérique par K-O
Dans la
Coupe Louis Vuitton, Russell Coutts va faire étalage de toute sa classe, 43 régates, 42 victoires. C'est du jamais vu. Mais le plus dur reste à faire, battre à domicile le Young America de
Dennis Conner. La victoire sera magistrale, le bateau américain sera surclassé sur un score sans appel de 5-0 à San Diego en 1995. C'est la seconde défaite pour Dennis Conner, et c'est aussi la seconde fois que la coupe quitte l'Amérique.
Dès lors, le nom de Russell Coutts devient une référence. D'ailleurs Coutts ne va pas s'arrêter de gagner, en 1996 il ajoute un 3e titre de champion du monde de Match Race à son palmarès.
Prophète en son pays
Mais déjà il faut penser à la défense de la coupe. Et cette fois-ci les rôles sont inversés, c'est Team New Zealand qui est le
defender. C'est tout un
Peuple qui est derrière son
Héros et la pression est terrible. Le
defender n'ayant pas le droit de participer à la
Coupe Louis-Vuitton, c'est à un challenger très affûté qu'auront affaire les néo-zélandais. Et beaucoup parient sur la défaite du bateau
kiwi. A la surprise générale, c'est le voilier italien
Luna Rossa barré par le talentueux
Francesco De Angelis qui bat d'une courte victoire America One de
Paul Cayard.
Là encore, la victoire tourne à une démonstration de Russell Coutts. Sur un plan d'eau difficile, avec des vents instables, les Italiens sont balayés 5-0 à Auckland en 2000. Dans la phase très délicate du départ, le voilier kiwi a toujours coupé la ligne le premier, ne laissant aucune chance aux Italiens de choisir le bon côté du plan d'eau. Coutts se paie même le luxe dans l'ultime régate de laisser la barre à un jeune très prometteur, Dean Barker. C'est tout un peuple qui chavire de bonheur, Coutts devient le héros de la nation.
L'ambiance Black Magic devient Black tout court
La fête va être de courte durée. Déjà les querelles internes se font sentir. Coutts est une idole, Peter Blake vit mal le statut de son poulain. Et surtout, Coutts en veut plus. Réduit au rang de barreur, il veut s'impliquer dans la gestion de Team New-Zealand et cela n'est pas du goût de Blake. Le monde de la voile étant petit, le conflit Coutts-Blake aiguise l'appétit des autres syndicats. L'arrivée d'un richissime industriel helvète,
Ernesto Bertarelli, va précipiter la fin de la belle aventure
Black Magic. C'est décidé, Coutts quitte Team New Zealand dans un tollé général.
L’aventure Alinghi
Bertarelli va offrir un pont d'or à Coutts pour rejoindre le projet
Alinghi. Et le projet est simple, partir d'une feuille blanche, et remporter la prochaine Coupe qui doit avoir lieu à
Auckland en 2003. Blake n'a pas vu venir le coup, et Coutts emmène avec lui toute sa garde rapprochée. La cellule arrière de TNZ est décimée, et TNZ ne s'en remettra pas. Entre temps, Peter Blake décèdera tragiquement en
Amazonie, ce qui finira de désorganiser le team.
La Nouvelle Zélande s'étouffe de colère. Comment a-t-on pu laisser partir un héros national pour une sombre affaire d'argent?
C'est tout un pays qui attend de pieds fermes ces traîtres, et c'est dans un climat délétère que débute la Coupe Louis-Vuitton. Des menaces de Mort sont proférées à l'encontre des marins et de leurs familles, et une campagne ultra-nationnaliste baptisée "Loyal" est organisée. Mais paradoxalement, cela va galvaniser Coutts, et c'est le mors aux dents qu'il entame ces régates. Malgré deux défaites, Coutts est une nouvelle fois impérial. Après une finale de la Coupe Louis-Vuitton très serrée face à BMW Oracle Racing, Alinghi décroche le droit d'aller affronter TNZ en Coupe de l'America. Le duel tant attendu va avoir lieu.
Une extrême tension règne sur Auckland avant le début de la coupe, qui va se dérouler au meilleur des sept matchs. Mais tout de suite Coutts démontre son insolente supériorité notamment dans la phase de pré-départ (dial-up). Les Kiwis avaient annoncé un bateau révolutionnaire, mais celui-ci fait preuve d'une extrême fragilité. De plus Dean Barker, le jeune barreur kiwi, n'est pas au mieux de sa forme, et face à Russell Coutts cela ne pardonne pas. Après une série de 7 régates annulées de manière très contestable, Alinghi remporte la Coupe de l'America par 5-0, et ramène le prestigieux trophée en Europe, après 152 ans d'absence.
La Coupe en 2007 sans Russell Coutts
A peine la coupe débarquée à Genève, que déjà des rumeurs se font entendre. La belle amitié Coutts-Bertarelli ne serait qu'une façade. Cela se confirme quelques mois plus tard. Lors de la refonte du règlement de la Coupe de l'America, Alinghi prévoit de régater contre les
challengers dans des compétitions appelées "Act". Une première est organisée à
Newport contre le "Challenger of Record" en l'occurrence les
Américains de
BMW Oracle Racing. Le clash intervient lorsque Coutts refusera de barrer SUI-64, et même de grimper à bord ! Après une sordide bataille d'
avocats, Russell Coutts est débarqué par le team qu'il avait amené à la victoire. Personne n'est dupe, si Alinghi a gagné c'est grâce à Coutts, et cela exaspère Bertarelli qui lui a amené des sommes colossales pour décrocher la victoire. Parallèlement, l'organisation de la coupe est attribuée à
Valence, lieu sur lequel Coutts a toujours émis des réserves. Une refonte complète de la Coupe de l'America est entreprise par AC Management, la nouvelle entité en charge de l'organisation. Celle-ci, dirigée par un proche de Bertarelli, va faire en sorte d'empêcher Coutts de prendre part à la prochaine coupe. Le divorce est consommé, et après un tour de passe-passe juridique, et une nouvelle fois une affaire de gros sous, Coutts se voit interdit par une manipulation du règlement de participer à la Coupe de l'America en
2007 qui sera tout de même remportée par Alinghi.
À la conquête d'un 4e sacre avec Oracle
Après avoir "digéré" son licenciement de chez Alinghi, Coutts en a profité pour développer une nouvelle jauge de bateau dans l'espoir d'attirer d'autre skipper vers un nouveau type de compétition. Les RC44 véritable "bête de course" sont nés de la collaboration de Coutts et de l'architecte Andrej Justin. Ces bateaux plus petits et donc plus maniables que les ACC devaient permettre des matchs beaucoup plus spectaculaires. Parallèlement, durant la dernière Coupe de l'América, l'actualité a semblé plus se concentrer sur l'avenir du génial barreur kiwi que sur les régates elles-mêmes. Les rumeurs sont allées bon train, notamment du côté des américains d'Oracle BMW Racing et de leur mécène L. Ellison, très remonté après la débâcle des demi-finales où Oracle est battu 5-0 par Luna Rossa. Le dénouement aura lieu à peine un mois après la seconde victoire d'Alinghi, Russell Coutts signe chez BMW Oracle Racing, et aura la lourde tâche de ramener l'aiguière d'argent aux Etats-Unis.
Vainqueur de la Coupe de l'America 3 fois consécutivement
- en 1995 à San Diego avec Team New Zealand sur le voilier "Black Magic"
- puis l’a conservée en 2000 à Auckland, toujours avec le Team New Zealand
- ensuite en 2003 à Auckland, avec le syndicat helvétique Alinghi
Il réalise ces trois victoires avec un score de 5 à 0. Il devient ainsi le barreur qui ramène la mythique Coupe en Europe pour la première fois depuis son départ pour le nouveau monde en 1851.
Avec trois Coupes de l'America (1995, 2000 et 2003), Russell Coutts à 41 ans égale les records de Charlie Barr (1899, 1901 et 1903) et de Harold Vanderbilt (1930, 1934 et 1937). Ainsi que de Dennis Conner qui la remporta 3 fois, mais pas d'affilée. Russell Coutts a d’autre part dépassé la meilleure série de victoires dans la Coupe de l’America, avec 14 succès consécutifs (9 avec Team New Zealand et 5 avec Team Alinghi). Avant lui, Charlie Barr avait obtenu 9 victoires de suite. Coutts bat également le record absolu de victoires dans les régates de la Coupe que détenait l’Américain Dennis Conner avec 13 succès en quatre éditions (1980, 1983, 1987 et 1988).
Liens externes